« La première femme aux cheveux “très courts” dont j’ai vu le portrait est Marie-Laure de Decker. C’était à New York en 2013. J’étudiais l’architecture (un milieu encore très masculin), je me passionnais pour la photo (un autre milieu encore très masculin). Je voyageais beaucoup. J’étais aventureuse. Tout me poussait au minimalisme et à l’expérimentation à la fois.
Alors un soir, en partageant une nuit magique avec des architectes expérimentaux – des monstres sacrés des années 70 – et de jeunes artistes plasticiens partagés entre le travail à la main et la programmation, je me suis décidée. Un jour, j’allais me séparer de ma manne, de mes boucles. De ce qui me définissait alors malgré moi. Un des architectes venait de me comparer à une peinture pré-raphaélite. Un compliment de son point de vue. Trop lourd à porter pour moi, j’en avais assez. Je ne voulais pas qu’on parle de ma beauté, toute relative et temporaire, je voulais échanger avec eux sur des sujets qui me passionnaient !
À l’annonce de cette nouvelle, un artiste talentueux que j’admirais et qui me dévorait des yeux en retour a tressailli et tenté de me conjurer de ne pas le faire.
Et c’est là que, plus que jamais, je savais que je le ferais.
Pas pour lui, pas pour son amour, pas pour cette société qui m’écrase de devoirs et me refuse les opportunités auxquelles j’aspire… Par pour tout ça. Pour moi. Pour me libérer, d’un poids physique. Et psychique.
Depuis, je n’ai jamais reçu autant de compliments sincères venant de tous bords. Rue, travail, psychiatre, amis, amours. Je ne me suis jamais sentie aussi libre et belle.
Et je comprends mieux Marie-Laure de Decker.
Aujourd’hui, je modèle le regard des autres, non plus l’inverse.
Et ceux qui ne s’attachent qu’aux apparences conformes à des idéaux qui n’en sont pas passent leurs chemins.»
Solen